vendredi 22 juillet 2011

Vos lectures d'été

Ces derniers mois, je me considère assez gâtée point de vue lectures (par exemple La marche en forêt, de Catherine Leroux, la recrue du mois de juillet). Avant les sorties de l’automne, il y a ce qu’on appelle les lectures d’été. Eh bien, cet été, je vous suggère des lectures pas trop légères. Pourquoi donc des lectures légères, l’été ? Parce qu’il fait trop chaud ? Humm… n’est-ce pas un peu paresseux ? Il me semble qu’une lecture d’été, c’est ce qui nous allume, ce qui nous tente. De celles qu’on rattrape, de celles qu’on attendait.

Je viens de terminer Elles ont fait l’Amérique. De remarquables oubliés, tome 1. Vite ! donnez-moi le tome 2! J’ai littéralement dévoré ce livre dans lequel Serge Bouchard et Marie-Christine Lévesque nous présentent des femmes qui ont marqué l’histoire de l’Amérique mais que, pour toutes sortes de raisons, nous avons oubliées… mais comment se fait-il ? me disais-je à la lecture de ce livre. Quel conteur tout de même que Serge Bouchard ! J’aimais déjà ce qu’il écrit dans L’Inconvénient, et je confirme : agréable à lire, bien raconté et bien écrit. Ces femmes inspirantes qui viennent de partout : le Canada, les États-Unis (avant qu’ils soient unis), la France, l’Angleterre, etc... c’est l’histoire de l’Amérique qui se dessine en même temps que les destins de ces femmes fortes et marquantes. Nous avons une autre chance de ne pas les oublier…

Durant l’été, on peut donc lire, aussi, pour ne pas oublier. Pour réfléchir. Pour entendre la poésie. Pour écrire. Par exemple, on peut passer un moment avec Geneviève Amyot, au bord du fleuve qu’elle aimait tant ou à l’intérieur de nous-mêmes; on peut se laisser emporter, rien qu'un peu, par ses mots parfois bruts qui vont droit au coeur :

Je me demande bien ce que les autres font avec leurs morts. Comment ils les plaignent, les râlent, les bercent, comment ils les rappellent, les invoquent, les étreignent, les annulent, comment ils les rendent enfin parfaitement aimables, de quelle peur, de quelle colère ils les maudissent. Je ne sais pas. On n’en dit rien dans les fauteuils, ni au bord des assiettes ou de la télévision. On conseille de repeindre les murs et de sortir davantage. Mais la lutte à la disparition ? À la fatalité ? Je ne suis pas la seule, c’est certain, à quérir tes prolongements. Je ne sais pas comment ils s’arrangent avec les vêtements vidés. De quelles larmes ils les bourrent. Ou les embrouillent. Je ne sais pas. Nous savons si peu de choses les uns des autres. Et nous aimons ainsi, si tant est que nous aimions Et nous partons ainsi, laissant traîner quelque énigme capitale à lancer aux arbres et aux oiseaux.

Je t’écrirai encore demain, Geneviève Amyot

dimanche 15 mai 2011

Une recrue printanière

Je sais que je n'ai pas beaucoup nourri ce blog dernièrement. Entre l'écriture et les 40 ans des Éditions du Noroît, mes nombreuses lectures, et les élections... le temps file. Mais il n'y a pas d'excuses, je le sais bien. Me voilà aujourd'hui parce que je tenais à vous parler de la Recrue du mois de mai, qui m'a agréablement surprise.

En mai, la Recrue est Lynda Dion, auteure de La dévorante, petit livre bien écrit. Je ne pouvais plus m'arrêter de tourner les pages, de lire, avant de me coucher, je me disais : encore un peu... Un livre du printemps, plein de désirs, d'envies, de vie (et au passage, quelques obsessions...)

Je vous invite à lire les avis des chroniqueurs, parmi lesquels le mien, sur le site de la Recrue du mois, bien sûr, mais également les réponses au questionnaire que nous avons préparé pour l'auteure. Ces réponses sont toujours intéressantes.
Promenez-vous sur le site, faites-nous part de votre avis, de vos coups de coeur en matière de premiers romans, recueils, livres jeunesse. De nombreux livres paraissent, de plus en plus me semble-t-il - mais est-ce moi ? - parlons-en ! Nous voulons vous entendre (vous lire) !

www.larecrue.net

dimanche 20 mars 2011

Un grand voyage


Il y a de ces livres dont on sait, dès les premières pages, qu'ils nous happeront. Pour moi, Aminata fait partie de ce genre de livre que l'on peine à refermer chaque fois, que l'on voudrait lire d'une traite tant c'est bon, bien écrit et sensible.
Aminata est une jeune africaine, pas encore une femme, qui est enlevée, puis traînée sur un bateau négrier. Elle survivra à une traversée irréelle, insupportable. Elle deviendra esclave, subira les pires humiliations, mais demeurera habitée de ce désir : retrouver sa terre natale. L'endroit où elle est née, où elle a été élevée par un père et une mère aimants. Elle se cramponnera à leur souvenir pour survivre :
« Chaque jour, je pensais à mes parents et les imaginais en train de me dire d'approfondir mes connaissances et d'utiliser mes talents. Mon corps appartenait à Robinson Appleby. C'était pour lui que je peinais dans la puanteur de la pâte d'indigo sous le soleil de plomb, dévorée par les moustiques. Mais c'était pour mon père que j'apprenais tout ce que Mamed savait sur la préparation de la pâte d'indigo et c'était pour ma mère que je devins l'assistante régulière de Georgia pour les accouchements dans les îles des basses terres. »

Je pourrais citer plusieurs passages magnifiques, lors desquels elle raconte ses voyages aux États-Unis, en Nouvelle-Écosse, en Afrique et à Londres. Une vie incroyable. Dure aussi.
Aminata est bien écrit, et bien traduit, ce qui mérite d'être souligné. Le texte coule, le texte émeut, nous prend à la gorge. Une telle force dans le récit, dans l'écriture ! Et puis, il y a le travail de l'auteur là-dedans sur la vie des esclaves qui est énorme. Et réussi : Aminata est bien campée, attachante, et profondément, profondément humaine.
Un livre inoubliable, que je suis presque triste d'avoir déjà fini. C'est un grand voyage que ce livre.
Achetez-le, lisez-le. Offrez-le en cadeau. Assurément, vous ne raterez pas votre coup.

samedi 15 janvier 2011

Recrue !

La recrue de janvier 2011 : Perrine Leblanc, qui a publié l'automne dernier L'Homme blanc aux éditions du Quartanier. Rendez-vous sur le site de la recrue pour lire les avis sur le livre et les chroniques de poésie, de livre étranger, de livre jeunesse... et les livres lus en repêchage. En plus, une nouveauté dans le webzine pour 2011 : un mot de la rédactrice en chef, très intéressant.
Le webzine devient complet et de plus en plus riche. Je vous invite à le découvrir, et à lire les livres que nous lisons... si les critiques vous en donnent envie. En ce qui concerne L'Homme blanc, vous serez convaincus. Donnez-nous en des nouvelles !

Bonne lecture !
www.larecrue.net

jeudi 30 décembre 2010

pour passer l'hiver...


profondeur sombre des forêts
avec ces sapins enchâlés de neige
ravins aux blanchâtres finitudes
et ces rivières gelées semblables
à de grands chemins pâles

montagnes transparentes au couchant
ma solitude habitée du paysage
ton souvenir en moi
les collines descendues au coeur

je me sens femme et vallée lointaine
et nuit à venir

(Marie Uguay, Signe et rumeur, 1976)

samedi 11 décembre 2010

Un petit mot sur La revanche de May

Le livre m'attirait car il me promettait une espèce de suspense relativement à un manuscrit... et que voulez-vous, j'aime les livres dans lesquels il est question d'un manuscrit secret, de gens qui le cherchent, un peu dans le style de L'Ombre du vent.

Une journaliste se voit remettre un manuscrit par un homme. Touchée par le récit de deux femmes qui se confondent, elle essaie de démêler ces histoires, de retrouver les femmes et les enfants impliqués. La recherche de la journaliste nous entraîne à travers plusieurs histoires - celles de femmes opprimées, celles d'enfants laissés à eux-mêmes, abandonnés, violentés.

On y croit, à ce récit enchâssé, on est emporté par la langue souple de Nassira Belloula, qui nous prend et nous entraîne là où elle le veut bien, à travers la blanche Alger - pas si blanche, finalement.

Alors je l'ai eue, mon histoire de manuscrit perdu, mais j'ai eu bien plus. Les histoires de ces femmes me rapellent l'importance d'écrire pour transmettre, ne pas oublier, et surtout, pour vivre et survivre.
La revanche de May, éditions de la Pleine lune, 2010, 216 pages.

lundi 29 novembre 2010

L'éternelle chanson (ou Pour bien commencer la semaine)

Voici un extrait de L'éternelle chanson, poème d'amour de Rosemonde Gérard, une poétesse française de la fin des années 1800, début 1900, mariée à Edmond Rostand (l'auteur de Cyrano de Bergerac). Cette femme a écrit des poèmes d'amour dont celui-ci que je reproduis partiellement plus bas, et dont une phrase, Plus qu'hier, moins que demain, est devenue populaire, symbole d'amour éternel, et a été reproduite sur une tonne de médaillons depuis le début des années 1900 pour les amoureux éperdus.
Alors, en l'honneur de Louis-Gilles et Françine, qui ont fêté leurs 40 ans de mariage en fin de semaine, lisons donc cet extrait de poème écrit par une jeune femme de 18 ans que l'on imagine aisément complètement amoureuse de monsieur Rostand (qui lui écrira sur l'amour aussi... ), laissons-nous emporter, rien qu'un peu :

Lorsque tu sera vieux et que je serai vieille,
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs,
Au mois de mai, dans le jardin qui s'ensoleille,
Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants.
Comme le vent nouveau mettra nos coeurs en fête,
Nous nous croirons encore de jeunes amoureux,
Et je te sourirai en branlant la tête,
Et nous ferons un couple adorable de vieux.
Nous nous regarderons, assis sousnotre treille,
Avec de petits yeux attendris et brillants,
Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,
Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs.

[...]

Et comme chaque jour je t'aime davantage,
Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain,
Qu'importeronta lors les rides du visage ?
Mon amour se fera plus grave - et serein.
Songe que tous les jours des souvenirs s'entassent,
Mes souvenirs à moi seront aussi les tiens.
Ces communs souvenis toujours plus nous enlacent
Et sans cesse entre nous tissent d'autres liens.
C'est vrai, nous serons vieux, très vieux, faiblis par l'âge,
Mais plus fort chaque jour je serrerai ta main
Car vois-tu chaque jour je t'aime davantage,
Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain.